Interviews

Fictions : quand l’imaginaire rencontre la pop

Photo : JB Ambrosini

Fictions. Ce qui est du domaine de l’imaginaire, de l’irréel. Pour Guillaume Léglise à l’initiative de ce projet solo, c’est l’occasion de se raconter et de raconter les autres à travers le prisme d’histoires romancées et écrites en français. A quelques années lumières de ses autres aventures musicales, ce touche-à-tout à la fois musicien, compositeur et producteur développe dans le premier EP de Fictions un univers étincelant et poétique où la pop se mêle à des airs disco et synthétiques. On l’a rencontré pour lui poser quelques questions.

Fictions donne pas mal de concerts depuis la sortie de l’EP. Tu es accompagné sur scène?

D’une bassiste, Clémence. Je l’ai rencontrée en produisant l’album de Lisa Li-Lund qui va sortir l’année prochaine chez Pan European. Elle a participé aux enregistrements. Lorsque j’ai voulu adapter Fictions en live je voulais quelqu’un à la basse, je voulais plutôt une fille et j’ai pensé à elle. Je suis très content parce qu’elle est super. Elle a joué avec Moodoïd et pas mal de monde. Pour l’instant on est en duo, ça me permet de faire les chansons avec des machines et une prod qui est proche du disque et en même temps d’être assez léger pour trouver des dates.
 

C’est un projet solo mais en prenant le nom de Fictions tu sembles prendre un peu de distance…

Oui. J’ai toujours bien aimé prendre des noms différents parce que ça permet d’installer un concept et un fil directeur. J’ai écrit une partie des paroles mais la plupart des textes sur l’EP sont écrits par Alexandry Costa. Je trouvais intéressant avec un nom comme Fictions de raconter des histoires, de faire quelque chose qui n’est pas juste de faire le chanteur, l’artiste entre guillemets basique mais plus un projet esthétique.

Fictions, c’est un peu la double influence française, avec aussi le cinéma et la littérature. C’est aussi le nom du label des Cure. Je suis un enfant de la new-wave et The Cure est un groupe important pour moi.

 

Les paroles en français, c’était évident pour toi?

Évident non mais j’en avais un petit peu envie. Comme je fais de la musique pour le théâtre, je me retrouve parfois à chanter des textes écrits par d’autres. Les comédiens m’ont souvent dit que je devais faire un disque comme ça. Et quand Alexandry m’a proposé d’écrire des chansons pour moi je me suis dit que c’était le bon moment.
 

Tu as des inspirations pour ce projet? On parle souvent de Voulzy, Gainsbourg…

Il y en a vachement. Il y a Jean-Louis Murrat que j’ai beaucoup écouté dans les années 90, les albums Dolorès et Mustango sont importants pour moi. Il y a aussi les débuts de Katerine avec l’album L’Éducation anglaise . Daho aussi, beaucoup. En fait, on va dire pas mal d’artistes qui sont dans une veine pop et qui ont des références musicales anglo-saxonnes, dont Voulzy mais pas que lui évidemment.
 

Tu travailles aussi pour le théâtre et la danse. Qu’est-ce que tu en retires?

L’intérêt pour moi c’est de sortir un peu de ma zone de confort et de faire des rencontres. Faire en sorte que ta musique puisse raconter d’autres histoires.

La musique rock aujourd’hui c’est rarement très politique et dérangeant malheureusement. C’est le plus souvent un format d’entertainment et de loisir et c’est difficile de pousser à ce que ce soit autre chose. Tandis qu’avec les metteurs en scène, tu peux aborder des thèmes plus politiques, plus contemporains avec des questions sociales et sociétales et c’est hyper intéressant. En plus d’être inspirant.

 

Disons que la musique contestataire s’est déplacée, on l’a retrouvée dans le jazz, le rock, maintenant elle s’est déplacée vers le hip-hop et le rap.

La musique est rentrée dans un business et une économie, tout comme les spectacles de danse et de théâtre d’ailleurs. Ça peut être aussi très feutré. Mais on est dans un pays où les artistes, metteurs en scènes et chorégraphes peuvent aborder des thèmes forts comme le capitalisme et l’identité. Je travaille beaucoup avec Nicolas Kerszenbaum qui est un auteur et metteur en scène avec qui je suis allé en Israël pour faire un spectacle sur les kibboutz. On va bientôt faire un spectacle à Cuba. J’ai aussi travaillé avec Aude Lachaise qui a parlé d’identité féminine dans ses spectacles. C’est ça qui est intéressant en fait.  

Dans tes clips on sent une certaine esthétique, il me semble qu’il y en a un qui est en cours de montage, c’est celui d’”UFO”?

Oui c’est le prochain qui va sortir. J’ai travaillé avec Laurent La Rosa qui est réalisateur. On avait pas mal d’idées et comme c’est une histoire d’extraterrestre on voulait quelque chose qui soit marrant à faire et pas passer à côté du sujet. Du coup on a mis un peu de moyens. C’est un clip qui a demandé plus de travail que les autres. Il va sortir bientôt. On va sortir “UFO” avec des remixes d’Id!r qui a son label Mange_Moi. Et on est en train de voir pour un ou deux autres remixes, ça va se décider là.
 

Il y a une prochaine étape en studio? J’imagine que sur scène tu ne joues pas que ton EP.

Actuellement il y en a cinq qui sont sorties, sur scène j’en joue neuf. J’ai un répertoire d’une quinzaine de chansons. D’ici la fin de l’année je voudrais en avoir écrit et au moins préproduit une vingtaine pour sortir un deuxième EP l’année prochaine et un album dans la foulée. C’est ça l’idée.
 

Comment gères-tu l’équilibre entre Fictions, Vox Low et tes autres projets?

Ça va, je m’en sors, parce que de toute façon on ne fait pas non plus 80 dates par an. Mais oui, ça demande de l’organisation. Comme je ne fais que de la musique, il me faut des choses tout le temps. Il faut travailler et essayer des choses. Le succès de chaque projet est souvent une interrogation. Vox Low, on ne pensait pas que ça allait aussi bien prendre et aussi vite. Après il faut se fixer des objectifs et tu vois où tu atterris, ce que tu arrives à faire. Chaque chose en son temps quoi.
 

Vous avez pensé à la suite avec Vox Low?

C’est encore un peu tôt. On tourne encore sur l’album, on a encore des dates jusqu’en décembre et des options pour l’année prochaine. On va jouer au festival Les Aventuriers, à Dijon aussi, et l’année prochaine dans un festival en Angleterre. Il va y avoir d’autres EP’s avant le prochain album.
 

Niveau production, sur quels projets as-tu travaillé récemment?

Le disque de Lisa Li-Lund est fini, il y aura des lives aussi. Le calendrier va se fixer. Ensuite, j’ai produit l’album de Victorine qui doit sortir cet hiver je pense sur La Tebwa. Je travaille aussi pas mal avec Rubin Et Le Paradoxe. Je participe à l’écriture de son prochain EP. On est très proches sur pas mal de points. Il a fait beaucoup de théâtre aussi. Je travaille également avec Soleil Vert, de la pop en français assez cheesy.
 

Qu’est-ce que tu écoutes en ce moment?

J’écoute pas mal d’artistes québécois, notamment Les Louanges, c’est vachement bien. Le Couleur aussi qui sont de Montréal. J’ai bien accroché à Hubert Lenoir, c’est assez glam. Ce qui se passe là bas sort un peu de ce qu’on entend ici. Culturellement, ils baignent dans autre chose donc c’est assez intéressant. J’écoute pas mal d’artistes electro aussi, ce qui est sorti sur Mange_Moi Records, le label d’Id!r qui est un label d’électro français assez underground avec notamment des Russes qui s’appellent Wolfstream. Ils sont en train de bien grossir.
 

Fictions sera en concert le 27 octobre au pop-up store de Brooklyn Brewery (event).

EP1 de Fictions est disponible via La Tebwa.