Dans ton label

Dans ton label #3 : #14 Records

À côté de majors qui occupent une large partie du terrain, les labels indépendants se démènent pour faire vivre des projets à taille humaine, bien souvent à contre-sens de tout objectif commercial et lucratif. À la tête de ces projets, on retrouve des guerriers multi-fonctions aux méthodes et profils divers et variés. Aujourd’hui, on part à la découverte du label strasbourgeois #14 qui revendique à travers son catalogue la pluralité des styles, oscillant entre pop, chanson française et folk-rock. Depuis plusieurs mois, c’est sur l’énergique Claire Faravarjoo que le label réunit tous ses efforts à l’occasion de la sortie imminente de son premier album “Nightclub”.
 

 

Pouvez-vous vous présenter ?

Salut à toute la team du Bombardier ! Nous, c’est Joël Beyler (fondateur et label manager) et Marie Ferrarini (chargée de prod) de #14 Records, un label indépendant basé à Strasbourg.
 

Pourquoi et comment avoir choisi ce nom de label ?

Joël : #14 Records, comme l’indique le dièse de son nom, symbolise l’élévation. On aime penser que les artistes trouvent ici l’épanouissement artistique et professionnel, rendu possible par l’action du label, par le croisement d’un projet artistique et de notre équipe. Et le chiffre 14 fait tout simplement écho avec l’année de création du label, en 2014 ! Il y a le côté graphique du # qui me plaisait bien aussi, un peu comme un maillage, des projets qui se relient entre eux.  
 

Que défendez-vous sur votre label ?

Joël :La musique et des artistes qu’on aime. Le respect de l’artiste, avant tout. Accompagner l’émergence d’un projet avec tout ce que ça implique. Mais aussi l’idée d’un métier, d’une filière et d’un écosystème, où toutes les parties prenantes sont interdépendantes. Sans artistes, pas de labels. Sans salles, pas de concerts. Sans oublier le public. Musicalement, on défend deux grandes familles : la pop française et le folk rock anglophone. On est aussi très attaché au professionnalisme, on essaie de faire les choses bien. On adore aussi le fonctionnement de cette filière, passionnante en termes de logique, de législation, de pratiques, etc. Le digital a mis un grand coup de pied dans tout ça, la filière s’adapte doucement. Mais, de fait, elle est en avance sur d’autres secteurs, qui commencent à peine à connaître ce type d’évolution.
 

Quels morceaux résument au mieux la politique de votre label ?

 
1. Jesse Winchester – “It Takes More Than a Hammer and Nails to Make a House a Home”

Joël :Ça, c’est pour notre côté DIY, on n’a pas peur de mettre les mains dedans pour parler un peu salement ahah… et puis même si tous les jours nous sommes à la roots avec nos marteaux et nos clous, il y a un petit quelque chose en plus, un bout de nous qu’on investit chaque jour pour construire une « vraie maison », qui nous ressemble et où tout le monde s’y sent bien… “It takes more that a hammer and nails, to make a house a home. It takes a firm foundation built on faith and love”


 

2. Marvin Gaye & Tammi Terrell – “Ain’t No Mountain High Enough”

Ce titre, c’est pour notre esprit d’équipe (aussi petite soit-elle !) et notre détermination commune… et quand on est bien entourés. There Ain’t no mountain high enough!


 

3. Cut Copy – “Feel the Love”

Et parce que chaque histoire avec nos artistes, c’est un peu comme une histoire d’amour… et finalement “It all comes down to you” (enfin eux !)


 

Votre plus gros succès jusqu’ici ?

 
Joël : Haha, qu’est-ce qu’un succès..? En tout cas, des projets dont on est fiers, il y en a pleins ! J’ai créé le label pour accompagner l’artiste Anastasia (et encore avant son groupe Les Dessous de la Vie), c’était génial de me lancer dans cette aventure. C’est vrai qu’on début, l’idée était de filer des coups de main, sans savoir trop où j’allais, sans forcément me poser des questions. Aujourd’hui, on change d’échelle, j’ai une super collègue et on a une approche plus stratégique, plus sélective. Depuis deux ans, on est à fond derrière Claire Faravarjoo, on s’éclate et elle nous le rend bien !    
 

Quelle est votre journée type ?

Marie : Nos deux journées sont complètement différentes – par contre, on a bien un truc en commun : du mail, du mail, BEAUCOUP de mails !! Pas vrai ? Je pense que c’est plus simple pour moi de décrire ma journée type (je suis un peu la “sédentaire” de l’équipe). Il faut dire qu’il y en a des casquettes dans le métier (manager, directeur, formateur, enseignant, consultant, et je pense en avoir oublié). Du coup Joël est sur tous les fronts, partout, tout le temps !
Ma partie, c’est l’opérationnel, c’est principalement des heures devant l’ordi avec toute une multitude de tâches à effectuer lorsque l’on encadre et supervise une production. Et puis des fois, on se retrouve sur des festivals pros, ou lors des résidences de nos artistes – et là ça change complètement le rythme !

Joël : Impossible de décrire une journée type, aucune ne se ressemble ! En tout cas, elles sont longues, je suis un forcené du boulot. Je suis un peu schizophrénique, je jongle entre plusieurs activités, plusieurs projets, toujours en lien avec les musiques actuelles ou le spectacle. Et j’essaie de conjuguer tout ça avec une vie de famille !
 

Indépendant, underground, DIY : même bateau ou pas ? Ça veut encore dire quelque chose pour vous ?

 
Ce sont des notions qu’on apprécie, dans lesquelles on peut se retrouver, mais à des degrés différents. Indépendants, on l’est clairement, on fait nos propres choix, on avance avec nos convictions, mais on la joue collectif, on se serre les coudes entre labels indépendants. La culture underground a généré plein de mouvements super excitants, le côté alternatif, on adhère à fond, même si on ne s’inscrit pas dans cette mouvance au niveau du label. Nos projets ne sont pas underground, mais ne sont pas mainstreams pour autant. Et puis, il peut y avoir dans l’underground le côté déviant, parfois radical… Là je m’y retrouve moins. Le Do It Yourself, c’est pareil, on adore le côté bricolage, la débrouillardise. Et c’est bien ce qu’on fait au quotidien : des choses bien avec des moyens limités. Produire en DIY, c’est aussi contrôler son projet, on en revient à l’indépendance. Mais le DIY a aussi ses débordements politiques, pouvant aller jusqu’à l’anarchie.
 

Comment signer sur votre label ? Vous acceptez les pots-de-vin ?

Marie : La condition quasi incontournable : il nous faut un coup de cœur musical. Le genre de coup de cœur où un son te fait arrêter trois minutes ton multitasking effréné de la journée. Donc, la musique avant tout, et puis, le jackpot, c’est le deuxième coup de cœur : celui qu’on aura en rencontrant l’humain derrière la création. Sinon pour les pots-de-vin : les seuls pots qu’on accepte, nous, ce sont ceux qui se fêtent aux bars. 

Joël : Par ici le bakchich..! Non, sérieusement, on est trop honnêtes pour ça !
 

Le futur de la musique, c’est quoi, quand et où ?

Marie : Le futur de la musique, c’est maintenant, c’est demain, et dans dix ans aussi. Il est partout, tout le temps, en constante mouvance et évolution. Imprévisible, et dans l’attente d’être découvert. 

Joël : Le futur, c’est aussi le retour du passé, des revivals de fous, musicalement, mais aussi au niveau des supports et des formats… Bien malin celui qui saura prédire l’avenir de la musique. Un gars me disait hier que le CD allait revenir en force, si ça se trouve, il a raison !  
 

Un artiste (vivant ou non) ou un album que vous auriez aimé́ sortir ?

Marie : C’est vraiment très difficile de faire un choix… J’ai beaucoup de noms qui se bataillent pour avoir la première place. Je ne vais pas trop taper dans le “old school” pour éviter de paraître nostalgique d’un temps que je n’ai pas connu…  Alors, je dirais Aventine d’Agnès Obel. C’est ma thérapie quand j’ai besoin de ralentir le temps, quand tout va beaucoup trop vite autour de moi. Cet album me transperce. Pour moi, il s’inscrit dans les intemporels, et ça, c’est un peu le secret d’un bon album, non ?

Joël : Waow, compliquée cette question. Je vais piocher dans le francophone, soyons chauvins pour une fois. J’aime beaucoup l’univers de -M-, la musique en renouvellement perpétuel, mais aussi son personnage, la façon dont il travaille son merchandising, ses objets. Et ses shows, quelle générosité sur scène ! J’adore son côté : je donne tout et je maîtrise tout de A à Z.
 

Votre prochaine sortie ?

Marie : Ouuuf, notre prochaine sortie, il va falloir vous accrocher, on la prépare et on attend de la dévoiler au monde depuis deux ans ! On est vraiment fiers de ce que l’artiste a réalisé. Et en plus de la sienne, il y a toute notre sueur dedans. Ce sera Nightclub, le premier LP de Claire Faravarjoo, qui sortira le 14 février 2020. Claire, c’est un grand coup de foudre qui s’est passé avec Joël en 2017 (moi je n’ai pas eu la chance d’être dans les bureaux ce jour-là). Elle a débarqué avec sa guitare et a simplement joué un morceau. Et depuis, le talent, le travail, la confiance… tout s’imbrique pour donner à présent “son bijou”, comme elle l’appelle.
 


 

Nightclub de Claire Faravarjoo sort le 14 février et elle sera en concert à La Laiterie (Strasbourg) le 15 février et au 1999 le 26 février (event).